Aujourd’hui, pour la série « S’installer et vivre au Canada » nous rencontrons Annie, écrivaine, qui a vécue au Canada et qui est repartie en France. Un témoignage émouvant et sincère. Merci Annie !

Peux-tu te présenter ?

Annie - ecrivain alchimisteAlors je m’appelle Annie, j’ai 35, euh non, 36 depuis quelques jours… Arf ! Sinon, je viens de la Brie (un coin à l’est en banlieue parisienne 😉 Depuis quelques mois, j’ai créé ma boite dans l’édition et le coaching d’écrivain. Avant, j’étais consultante dans un truc très chiant ^-^

Où vis-tu actuellement ?

Dans un coin assez sordide de banlieue parisienne (mais c’est temporaire hein ! bientôt je serais millionnaire lol)

Raconte-nous comment t’es venu l’envie de vivre au Canada ?

Le Canada, c’est un peu comme un attracteur étrange dans la théorie du chaos (non physiciens bonjour !) En fait, l’idée de partir au Canada, et à Montréal en particulier, revenait périodiquement dans ma vie : tentative avortée d’Erasmus et de thèse co-encadrée. Il faut dire que ma sœur aînée avait vécu un an là-bas et qu’elle voulait périodiquement que je me mette un coup de pied aux fesses et que je m’envole de l’autre côté de l’Atlantique.

Mais à chaque fois, j’avortais la mission. Peur, flemme de l’administratif, etc.

Et puis mon mari s’est approché dangereusement de la date de péremption PVT. Il rêvait depuis longtemps du Canada, il avait renoncé à une carrière de garde forestier pour disséquer des animaux dans un labo. Mais il se voyait vivre dans les grands espaces, moi, pas trop, les immeubles et les boutiques Sephora, j’aime bien aussi. Mais j’ai senti que si on ne partait pas maintenant, il le regretterait toute sa vie. J’ai senti que si je ne me mettais pas enfin ce coup de pied tant attendu, j’allais m’enfermer dans une vie qui ne me convenait pas : bosser comme un chien pour gagner certes pas mal, mais ne pas avoir le temps ni l’envie de faire la chose la plus importante pour moi : écrire.

J’ai toujours rêvé d’être écrivain.

Alors je suis entrée en mode berserk. On a eu le PVT.

Comment s’est passée ton adaptation au Canada ?

Dans la douleur les deux premiers mois. Pour des raisons d’économie, on s’est retrouvé dans un appart miteux du Plateau, entourés de gens chelous, le genre qui hurlent et tapent des pieds pendant une nuit entière. Pour des raisons d’économie, on ne faisait rien. Je m’emmerdais. Et puis mes amies me manquaient, ma maman faisait la grève de la faim. Chaud, chaud.

Mais on s’est accroché (ou plutôt mon mari a trouvé la force de me supporter). Et moi, j’ai eu l’idée de m’inscrire à un Meet-up de conversation anglaise puis à un Meet-up d’écriture. J’ai rencontré une japonaise, une colombienne et enfin deux québécois avec qui on a décidé d’écrire un bouquin (en anglais oO).

Deux mois plus tard, au Comiccon, je rencontre mon futur employeur. Une start-up dans le jeu vidéo qui coachait d’autres start-up. *-*

J’étais lancée. J’avais cessé de grogner (mais dès que le terme est arrivé, on a quitté cet appart de fou).

Peux-tu nous partager ton avis sur quelques points au Canada ?

  • La mentalité des gens

Eh bien, avec ce que je viens de dire, commençons par les gens. Je ne reviendrais pas sur ce que vous avez dû entendre mille fois : les québécois sont gentils. C’est vrai, vrai et encore vrai (oui, même le voisin qui prenait de la drogue de cheval). Enfin, ils ne sont pas forcément plus gentils, ils sont juste mieux élevés et mille fois moins tendus que les Parisiens. Car la ville est faite pour les humains, pas pour les rats. Car la verdure est au centre de tout. Car ça bouge, ça réseaute, ça fait la fête, et pas qu’en été. Vous avez jamais assisté à un feu d’artifice par moins 20 ? C’est le moment d’essayer 😉

  • Le climat

L’hiver, parlons-en car ça reviendra forcément dans la conversation. Là, mon radin de mari n’a pas eu son mot à dire, aux premiers cheveux gelés, à la première slosh, j’ai pété la boutique. Bottes Northface, blouson Apteryx (car je suis anti-fourrure et anti oie plumées vivantes par des petits Chinois, fuck Canadian Goose), polaires, collants et chaussettes en cachemire. Tout ça, tout ça. Et je n’ai jamais vraiment souffert de l’hiver. (PS : on attache son manteau et on met ses gants AVANT de sortir, sinon après, on y arrivera pas, les doigts gèlent trop vite.) En fait, j’ai plus souffert de la chaleur que d’autre chose, donc, il vaut mieux des tenues modulables pour vous déshabiller dans le métro, et des matières qui permettent de faire du sport en plein air. Et il faut se bouger le cul. L’hiver au Canada, il faut en profiter sinon on ne l’apprécie pas : fête des lumières, chiens de traîneau, ski sur le Mont Royal, patin en forêt, plan chalet avec les potes… On a eu de la chance de rencontrer des expats qui nous ont bougés. Des français. Beaucoup de Français quand même dans nos amis. Les Québécois sont très gentils, ils parlent français et on a tendance à oublier que nous ne sommes pas de la même culture mais c’est le cas. Par exemple, je me suis très vexée de voir mes collègues québécois venir chez moi pour des « cheese party » alors que jamais ils ne m’ont invitée chez eux. Alors que les français rendent l’invitation. C’est peut être culturel… Et j’ai peut-être commis des impairs de mon côté… (PS : le barbec, faut le lancer à 17h tapante). Enfin résultat, je n’ai gardé que très peu de potes québécois. Ceux de mon groupe d’écriture, et encore. Mais enfin, loin des yeux, loin du cœur et on a passé des moments magiques ensembles.

  • L’emploi

Un domaine où on perd vite ses illusions, c’est le boulot. J’ai eu une chance de cocu (hum…). J’ai trouvé un boulot génial avec un employeur qui s’est battu pour m’obtenir un emploi et que j’ai dû lâcher peu de temps après. Et guess what ? Il ne recommencera pas. Les employeurs commencent à être échaudés avec les PVTs et les pitbulls d’immigration Canada, et puis des Français sur-diplômés sur le marché du travail, il y en a beaucoup… J’ai eu de la chance mais aussi j’avais l’esprit ouvert et j’ai saisi une opportunité qui passait (au Comiccon…). Mon mari a perdu du temps à chercher dans son domaine et il n’a réussi que lorsqu’il a accepté de faire un virage à 180°. Là-bas, on vous recrute par réseautage et souvent sur vos « soft skills». Les softs skills se sont ceux qui vous permettent de sauter du coq à l’âne. N’oubliez pas d’emporter vos baskets !

Pourquoi avoir décidé de quitter le Canada ?

En fait, l’anorexie de maman, ce n’était pas que de la déprime, elle avait un cancer. Je n’ai pas pu gérer la distance.

Comment s’est passé ton retour en France ?

Dur. Pour mon mari surtout. Il avait tellement galéré à trouver du travail là-bas qu’il a voulu chercher du boulot tout de suite. Le peu qu’il avait fait là-bas lui a boosté son CV et il a trouvé direct, pas le temps de trouver un appart, de s’organiser. Mais les allers retours Paris banlieue de 4h-5h par jour, c’est usant. La gueule des gens dans le métro, ça vous fout un coup. Il a perdu en un mois toute la sérénité qu’il avait gagnée en deux ans au Canada.

Moi, j’ai pris le temps de souffler, j’ai fini par me caser dans un petit CDD tranquille pour remplacer une collègue. Mais j’avais l’horrible impression de ne plus être à ma place.

Quelles sont les choses que tu appréciais le plus au Canada ?

L’effervescence et l’esprit d’entrepreneur des gens. C’est la mentalité anglo-saxonne. Ils ont pris le meilleur des deux mondes les Québécois. Même les écrivains sont différents. Là-bas, quand on écrit un livre, on ne se contente pas de l’envoyer par la poste à un éditeur puis d’attendre en croisant les bras. On réseaute, on paie un éditeur free-lance, on va vendre notre livre, on bouge son cul et on investit sur soi car on n’a pas honte de dire qu’un jour, on vivra de notre passion et qu’on fera tout pour y arriver.  

Avec le recul, dirais-tu que la vie est meilleure dans l’un des deux pays ?

Montréal versus Paris ? Montréal bien sûr. Après, par rapport à la Creuse, je ne peux pas juger. J’ai testé Montpellier, Rennes et Grenoble aussi, des villes plus agréables que Paris mais Montréal les bat toutes quand même.

Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté ?

Du courage. Le courage de ne pas retourner dans cette vie qui m’étouffait. Le courage de me mettre à mon compte comme consultante. Le courage de dire à mon ancien employeur et unique client « Non, là, démerde-toi quelques mois, j’ai envie de m’investir sur mes autres projets. » Le courage d’annoncer à mon réseau d’écrivain sur Facebook que tient, j’allais peut être donner mes conseils d’écriture contre de l’argent. Le courage de garder un mi-temps pour mes romans. Le courage de payer une pro de la comm pour revoir mes sites.

Bref. Un changement de façon de voir le monde qui se traduit par un changement de vie. Après, peut-être que je vais me viander. Je rebondirais, j’ai toujours mes baskets.

Que conseillerais-tu à quelqu’un qui souhaiterait vivre au Canada ?

  1. De le faire bien, de ne pas se soucier au dernier moment de comment prolonger son visa, de se renseigner sur le CAQ en arrivant, voire même de partir avec la résidence permanente. C’est dur de quitter son pays natal, mais c’est un déchirement d’abandonner son pays de cœur.
  2. De vous inscrire au chômage avant de partir, au cas où. De ne pas laisser votre électroménager dans un garage avec des hirondelles, au cas où. On ne sait jamais…
  3. Que vous soyez loin ou tout près, profitez de ceux que vous aimez à fond. Faites-vous plaisir surtout.

As-tu des ressources à partager ?

www.google.com

Oh ! Lol quoi ! J’ai beaucoup utilisé le forum PVTiste.net mais j’ai l’impression qu’il a été revendu.

Il faut s’abonner à la newsletter d’expérience Canada pour ne pas louper les inscriptions au PVT et en savoir plus sur les autres visas. www.cic.gc.ca/francais/travailler/eic/index.asp

Ou traîner sur ton site. Je pense qu’il y a pas mal de matière 😉

As-tu un dernier mot à ajouter ?

Je crois que j’ai été assez bavarde non ? ^-^

Bon vent !

Vous aussi vous avez vécu une expérience au Canada et vous souhaitez la partager ? Contactez nous !

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